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Pourquoi pas un peu moins de stress?

 

 

Chez les mammifères, le stress est une réaction d’adaptation. Mais nous ne vivons pas comme des mammifères, loin de là...

 

Les théories de l’évolution nous montrent que les espèces évoluent par mutations chromosomiques successives. Les plus avantageuses en ce qui concerne l’adaptation à l’environnement mènent à la survie des êtres qui en sont dotés, qui peuvent ensuite  les transmettre à leur descendance. L’astrophysicien Hubert Reeves dit en souriant que nous sommes là parce que nos ancêtres ont été capables de manger assez longtemps pour pouvoir se reproduire avant de se faire manger.

Le stress est avant tout un réflexe adaptatif qui permet d’augmenter ses chances de survie en cas de danger et qui permet aussi de mieux se mobiliser pour satisfaire des besoins de base comme manger, se reproduire, se mettre à l’abri. Dans un environnement naturel, il augmente les chances de survie.

Cette réaction biologique d’adaptation peut se produire de façon aigüe, comme lorsque notre cœur part en chamade à la suite d’une peur intense. Elle peut aussi être moins intense mais s’installer de façon chronique, comme lorsque nous restons tendus à essayer de mettre en place des solutions à des problèmes qui nous troublent, sans y parvenir vraiment; apparaissent alors de nombreux symptômes, comme en vivent de plus en plus de gens aux prises avec des problèmes de travail, dont la surcharge.

 

Normal mais... inutile!

 

Rien de plus normal que de serrer les dents quand on tente d’ouvrir un pot qui résiste à notre effort ou de serrer le volant quand on est vraiment pressé tout en étant pris dans un bouchon de circulation. Et on trouve aussi normal de voir les gens être physiquement tendus et presque courir quand ils sentent une pression à livrer la marchandise au travail. Et, dans les trois cas,... rien de plus inutile non plus!

Notre cerveau de mammifère n’a pas intégré que l’adaptation aux demandes d’ordre psychologique requiert du recul et de la réflexion, suivis d’action éclairée ou de lâcher prise, plutôt que des tensions musculaires et une augmentation de la fréquence cardiaque. Il répond toujours en élevant le niveau de stress, peu importe le type de besoin.

 

Normal mais... nuisible

 

Il est utile au cerf de Virginie de rester concentré sur l’odeur du loup. Le réflexe biologique de stress amène ainsi le cerveau à rester concentré sur le danger tout en augmentant la capacité physique à fuir ou à se battre. 

C’est par le même réflexe qu’on peut rester troublé, voire obsédé par une situation qu’on trouve psychologiquement menaçante (maladie d’un enfant, incertitude financière, surcharge de tâches tant au travail qu’à la maison, etc.) sans pouvoir vraiment décrocher tant que ce qui ne va pas n’est pas réglé. De plus, cela se fait au détriment de la capacité de recul et de réflexion, des influx nerveux inhibiteurs venant alors limiter nos capacités cognitives. On peut ruminer, mais cela n’est en rien efficace pour trouver des solutions. De plus, le stress se fait sentir à tous les niveaux dans le corps, ce qui se manifeste par des symptômes cardiovasculaires, digestifs, respiratoires, immunitaires, musculo-squelettiques, etc. (1). 

La réaction de stress se révèle donc non seulement nuisible pour régler ce qui l’a déclenchée, mais aussi en ce qui concerne la santé, si elle est maintenue longtemps.

 

La chronicité

 

Une réaction de stress aigüe n’affectera pas longtemps une personne en bonne santé. Le cœur battra plus vite, l’estomac se serrera, la glycémie augmentera, mais le tout reviendra dans l’ordre assez rapidement après la disparition du danger. Par exemple on a eu très peur d’avoir un accident de voiture, le cœur s’est emballé, mais tout est revenu dans l’ordre quand on a réalisé qu’on s’en était tiré avec plus de peur que de mal. 

Il en va autrement quand la situation qui nous trouble perdure. Les hormones impliquées engendrent une panoplie de symptômes durables, tant physiques que psychologiques (2), qui peuvent mener à toutes sortes de malaises, jusqu’à la maladie. 

Comme cette réaction est inutile et qu’elle devient nuisible à moyen terme, alors il devient évident qu’on gagne à mieux la cerner et à prendre les moyens de la réduire.

 

Vigilance, réflexion, action

 

La première pratique utile est de s’habituer à prendre conscience de la tension qui nous habite. La réaction de stress porte à diriger son attention vers l’extérieur pour qu’on puisse agir de façon à résoudre le problème qui l’a engendrée. Cela est évidemment utile, mais on conviendra que l’augmentation des tensions musculaires et la diminution de l’amplitude respiratoire ne serviront à rien. Le plus souvent, il est en effet tout à fait possible de passer à l’action avec un certain calme.

Pour contrer ce mauvais réflexe, il est utile de prendre conscience de la tension, de la diminuer, de prendre du recul et d’agir de façon intelligente.

Pour diminuer la tension, rien de mieux à court terme que quelques bonnes respirations lentes, si possible avec gonflement de l’abdomen à l’inspiration et dégonflement à l’expiration. Ce simple geste nous permettra de diminuer le stress biologique, de prendre du recul et on pourra alors mieux juger de la situation. Qu’est-ce qui me stresse?, est-ce vraiment dangereux?, est-ce vraiment grave?, cela nécessite-t-il une action immédiate?, si oui laquelle serait la plus intelligente et dois-je l’accomplir en courant?, si non, qu’est-ce qui serait utile de faire?

Cela peut aussi nous amener à poser des gestes qui préviendront la récurrence de situations d’urgence. Qu’est-ce que je peux faire pour que ça ne revienne pas constamment? Demander à faire diminuer ma charge de travail?, mieux m’organiser?, apprendre à m’affirmer?, éviter la procrastination?, cesser de me demander l’impossible?, mieux prendre soin de moi?, voilà autant de directions qui pourraient être envisagées avec profit. 

On gagne aussi, évidemment, à réfléchir à ces questions en dehors des moments où le problème se pose dans l’immédiat. La prévention, ça ne s’organise habituellement pas en situation d’urgence...

 

Gérer le corps

Certaines pratiques très simples font diminuer le taux des hormones de stress circulant inutilement dans notre sang. Sommeil suffisant, utilisation de pauses, techniques de relaxation/méditation, activité physique, consommation saine des substances excitantes comme la caféine, moments pour relâcher à la maison pour éviter d’être constamment à la course pour finir l’interminable liste de tâches, voilà autant de moyens utiles à limiter les probabilités que le stress ne nous crée des difficultés qui viendraient s’ajouter à celles qui l’engendre. Car non seulement ça va mal, mais voilà en plus les brûlures d’estomac, l’irritabilité, les problèmes de sommeil, la fatigue qui ne lâche pas, etc.!

 

Pensées et ses émotions

 

La plupart de nos actions sont commandées par des émotions plus ou moins intenses, qui tournent autour de l’objectif de réussir à combler nos intérêts, nos désirs, ou à autour de celui de venir à bout de ce qui nous fait peur, de ce qui nous dérange. Si certains attraits et certaines peurs semblent innés, nos réactions à ce à quoi nous faisons face au quotidien dépendent le plus souvent d’attitudes apprises. 

Des croyances comme «on n’a pas le droit de se reposer tant qu’on n’a pas fini de faire ce qu’on a à faire», sont nécessairement apprises. Par exemple, la peur de déplaire, le sentiment d’obligation devant ce qui nous est demandé ou le désir d’être meilleur que les autres sont autant d’émotions qui peuvent mener à un stress indu sans pour autant être fondées dans la réalité. Beaucoup de gens tout à fait sains savent en effet être responsables sans avoir peur de déplaire, savent poser des limites aux demandes des autres tout en faisant largement leur part et peuvent se satisfaire d’un travail bien fait même si d’autres s’évertuent à faire plus ou mieux.

Or, ce qui a été appris peut être remplacé par un autre apprentissage. On peut apprendre à s’affirmer, à limiter ses ambitions, à se reposer même si tout n’est pas fini, à faire une chose à la fois sans se presser indûment, à accepter que ce ne soit pas la fin du monde de décevoir ceux qui nous en demandent trop, qu’il est tout à fait légitime de limiter ses heures de travail à ce qu’on a signé dans son contrat de travail, etc. Dans ce dernier cas, on se rend responsable d’accomplir son travail avec efficience durant ses heures de travail, et on remet à l’employeur la responsabilité du reste. Ce n’est pas nous qui ne sommes pas assez performants, c’est lui qui ne se donne pas les moyens de ses ambitions. À lui d’assumer son manque de responsabilité, ce qui n’empêche pas qu’on puisse donner un coup de main supplémentaire à l’occasion.  

 

Restructuration cognitive

 

Une partie importante de la psychologie cognitive, notamment l’approche émotivo-rationnelle,  porte sur la prise de conscience des idées qui sont à la base de comportements néfastes et d’émotions non fondées ou inappropriées. L’application dans le thème qui nous intéresse ici consiste à explorer le bien-fondé des idées qui nous poussent à réagir avec beaucoup de stress devant certaines situations relativement inoffensives, comme si on n’avait pas le choix. 

Quelles sont mes croyances à ce sujet? Sont-elles fondées? Par exemple, mes croyances m’amènent à tout faire à la perfection. Est-ce fondé? Qu’arrivera-t-il vraiment si je m’arrête à un niveau où ce que je fais est très bien fait et satisfait tout le monde? Ou encore, je réalise que j’ai une peur bleue de déplaire car cela m’amènerait à être rejeté; qu’arrivera-t-il vraiment si je pose mes limites dans cette situation précise? Serais-je vraiment rejeté? Ou encore, je travaille comme un fou parce que je pense que je ne vaux pas grand chose et je ne voudrais pas que ça se sache. Est-il vrai que je vaux rien? Est-ce l’opinion des gens que je côtoie?

 

En fait, on trouve une multitude de ces croyances non fondées et limitatives qui engendrent des émotions nous causant un stress énorme pour rien. Le travail de restructuration cognitive sur les idées irréalistes (une recherche internet avec ces mots permettra d’avoir accès à beaucoup d’autres idées fausses possiblement néfastes) est une autre façon féconde de réduire le stress inutile. C’est souvent un bon départ pour diminuer l’anxiété ou pour limiter l’appréhension, toutes deux sources de stress inutile.

 

Les petites phrases utiles

 

On trouve aussi dans la sagesse populaire des idées ou des pratiques pouvant aider à changer ses façons d’appréhender les choses et de limiter de beaucoup le stress non nécessaire. Respirer par le nez, prendre une chose à la fois, attendre d’être rendu à la rivière avant de se tracasser avec l’état du pont, il vaut mieux prévenir que guérir, demain est un autre jour, il y a plus de gens pressés que de choses urgentes, ce n’est pas tant les choses qui nous troublent que l’idée qu’on s’en fait, on peut être efficace sans être pressé, choisir ses combats, évitons de mettre 20$ d’énergie sur un problème de 10¢, pas de responsabilité sans pouvoir, etc. sont autant d’indications qui peuvent nous mettre sur la piste de façons efficaces mais moins stressantes d’aborder la vie. 

 

Conservons l’énergie...

Le mode de vie qui s’est progressivement imposé dans les sociétés occidentales amène actuellement la plupart des gens à vivre comme s’ils manquaient de temps et à croire qu’ils n’en font pas assez. Il est devenu normal d’être fatigué et de ressentir toutes sortes de malaises liés au stress.

Or, il est possible d’alléger sa tâche globale et d’effectuer la majorité des choses qui restent avec beaucoup moins de stress. Et comme le stress empoisonne la vie et finit par rendre malade, il est très utile de voir ce qu’on peut faire pour réduire ce fléau inutile.

 

(1) Pour une autoévaluation, voir Lafleur, Jacques : Le diagnostic du stress, première étape du traitement, Travail et santé, vol 22, no 3, septembre 2006, disponible aussi sur

https://apprivoisersonstress.ca/stress-au-travail/articles-parus-dans-travail-et-sante/test-du-mille-pattes/

 (2) Voir Lafleur, Jacques : Le poids allostatique, Travail et santé, vol 27 no 2, juin 2011, disponible aussi sur https://apprivoisersonstress.ca/stress-au-travail/articles-parus-dans-travail-et-sante/le-poids-allostatique/