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Recommandée par le psychiatre David Servan-Schreiber comme moyen de soulagement ou de guérison du stress, de l’anxiété ou de la dépression, la cohérence cardiaque est un nouvel outil de régulation organique dont les effets dépassent largement le seul niveau des troubles de l’humeur. Son impact confirme la capacité qu’a chaque individu d’influencer favorablement sa santé par des moyens d’ordre psychobiologique. Est-ce pour vous?

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La cohérence cardiaque : est-ce pour vous?

Par : Jacques Lafleur, psychologue

Paru dans Travail et santé, vol 27 no 3, septembre 2011, révisé en février 2017

 

La cohérence cardiaque est un indicateur de fonctionnement psycho-organique relativement nouveau. Depuis une vingtaine d’années, on l’associe à un état où les dimensions corporelle, intellectuelle et émotionnelle d’un individu sont en harmonie. Sa mesure se fait par l’enregistrement de la fréquence cardiaque, dont on mesure la variabilité d’un battement à l’autre. Il faut savoir ici qu’un pouls de 60, par exemple, n’est jamais le résultat de 60 battements d’une durée d’une seconde chacun. La moyenne est d’une seconde mais, d’un battement à l’autre, la fréquence cardiaque varie considérablement. Un pouls de 60 pourrait en effet facilement, à l’intérieur de la même minute, varier entre 45 et 75 pulsations par minute (45 : battement de 1.33 seconde et 75 : battement de 0.8 seconde).

Un ordinateur doté du logiciel emWave® Desktop (1) peut, grâce à un capteur placé au doigt ou au lobe de l’oreille d’une personne, enregistrer sa fréquence cardiaque à chacun des battements de son cœur. Il trace alors en continu une ligne qui montre l’évolution de la variation de son pouls. À chaque battement, l’ordinateur répond à la question suivante : si la durée de ce battement était stable durant une minute, à combien serait le pouls? On parle de cohérence cardiaque quand la ligne tracée par l’ordinateur ressemble à une sinusoïde, montrant une accélération sur quelques battements, suivie d’une décélération sur un nombre équivalent de battements, encore suivie d’une accélération, et ainsi de suite. Par exemple, on verrait successivement un pouls à 66, 68, 69, 71,74, 76, 75, 73, 72, 70, 68, 66. 65, 67, 68, 70, 72, 73, 75, 77, etc. Dans ce cas, la direction de la variation devient prédictible.

Dans la vie de tous les jours, la cohérence cardiaque se produirait spontanément dans les moments de détente ou dans les moments d’émotions plutôt heureuses. Pris avec le stress ou des émotions difficiles (colère, frustration, etc.) l’individu verra cependant son cœur battre avec incohérence, le graphique montrant une ligne brisée à partir de laquelle il est impossible de prédire, d’un battement à l’autre si le cœur va accélérer ou décélérer. Par exemple, on pourrait voir, d’un battement à l’autre : 80, 89, 76, 93,78, 73, 80, 84, 67, 78, etc.
Le stress et les émotions difficiles non seulement augmentent la fréquence cardiaque moyenne, mais ils rendent aussi sa variation chaotique. Détente et émotions heureuses ralentissent au contraire le cœur et donnent à la variabilité de la fréquence de ses battements une allure cohérente.

Oui, mais encore?

L’intérêt de cette mathématique réside dans le fait qu’on peut en tirer des aspects utiles et relativement faciles à intégrer dans sa vie. Si la cohérence cardiaque peut survenir spontanément dans les moments de calme et de bonheur, on peut aussi la déclencher volontairement soi-même en pratiquant certaines techniques. On distinguera donc deux aspects de la cohérence cardiaque : celui de l’état de la variation de la fréquence cardiaque (variation cohérente ou non), et celui d’une technique qui favorise l’état de cohérence. Au nombre des impacts positifs du déclenchement et du maintien de la cohérence cardiaque, on trouve les mêmes que ceux qui découlent de la pratique régulière (quotidienne) de toute méthode de relaxation ou de méditation: réduction du stress et amélioration des fonctionnements physique et psychique, ce qui a été − et est encore − largement documenté (Voir Quelques clés pour relaxer).
La cohérence cardiaque favorise un fonctionnement harmonieux des branches sympathique et parasympathique du système nerveux autonome. Elle est aussi le reflet de cette harmonie. Le cœur a son propre «cerveau» (composé d’environ 40,000 neurones), qui influence continuellement le cerveau qu’on a dans la tête. Ce dernier, en retour, répond à cette stimulation. Ensemble, ils maintiennent la cohérence cardiaque ainsi qu’un meilleur équilibre des deux branches du système nerveux autonome ou, au contraire, quand le stress est élevé, ils maintiennent une sorte de déséquilibre, le plus souvent en faveur du fonctionnement sympathique (lequel est relié à l’adrénaline). Cette discordance étant l’un des facteurs à l’origine de tous les maux liés au stress, il devient intéressant de savoir comment redonner un meilleur équilibre à son système nerveux.

En clinique, on se sert de la cohérence cardiaque pour aider nos clients à gérer l’anxiété, réduire les sentiments dépressifs, améliorer le sommeil, apaiser le colon irritable, gérer la colère, améliorer les performances sportives ou intellectuelles, diminuer la tension artérielle, contrôler les fringales, mieux contrôler obsessions et compulsions, mieux gérer la douleur, etc. Il y a ici beaucoup d’avantages pour le peu de temps consacré. Ce n’est pas un remède miracle, mais il y a amélioration significative de la plupart des symptômes associés au stress.

Dans son livre Guérir (2), le psychiatre David Servan-Schreiber présente les résultats suivants, obtenus pendant une recherche qui impliquait de très nombreux gestionnaires commençant à pratiquer la méthode assidument. Les pourcentages montrent la proportion du nombre de participants à la recherche qui se plaignaient de chacun des symptômes en rubrique avant la pratique, 6 semaines après le début de la pratique (pour les deux premiers symptômes) et 3 mois après.

Palpitations : 47%, 30%, 25%
Tensions dans le corps : 41% ,15 %, 6%
Insomnie : 34%, 6%
Sentiment d’épuisement : 50%, 12%
Douleurs diverses, dont le mal de dos : 30%, 6%
Les gens qui se disent anxieux la plupart du temps : 33%, 5%
Les gens qui se disent mécontents la plupart du temps : 30%, 9%

Les gens qui se disent en colère la plupart du temps : de 20%, 5%.

La majorité des participants décrivent une nouvelle capacité à gérer leurs émotions.

On constate facilement que, sans être efficace à 100%, la méthode donne des résultats intéressants. On notera au passage, en regardant les pourcentages de départ, que les postes de gestion ne semblent pas favoriser la santé. Les gestionnaires de tous niveaux ont eux aussi avantage à prendre conscience des effets potentiellement pathogènes de leur implication dans le travail.

 

 

Déclencher et maintenir la cohérence cardiaque

Les principaux chercheurs sur le sujet (HeartMath LLC, Californie) proposent une méthode en trois temps pour déclencher la cohérence cardiaque, appelée Quick coherence technique.

  1. On dirige et on garde son attention sur la région de son cœur (heart focus).

  2. On respire «à travers» son cœur, avec une inspiration et une expiration égales, lentement, idéalement autour de 5 secondes chacune, ce qui donne des cycles de 10 secondes (heart breathing).

  3. On pense à un évènement heureux, à une situation agréable, à une source d’amour ou de compassion, à ce qui pourrait inspirer de de la gratitude, de l’appréciation, etc. (heart feeling)

Et on poursuit un certain temps. Au moins cinq minutes quotidiennement, avec un jour par semaine à dix minutes. Ou, si on s’engage plus sérieusement, on pratique deux fois dix minutes par jour. Certaines recherches demandaient une pratique de 30 minutes, 5 jours par semaine. Le graphique que déploie le logiciel donne un tableau qui montre une accumulation de «points» en relation avec le temps passé en cohérence. L’accumulation d’un certain nombre de ces points sur une base quotidienne et hebdomadaire peut aussi constituer une donnée servant à situer la durée efficace de la pratique. Dans les vidéos (voir plus loin), le psychiatre Servan-Schreiber propose au départ une pratique de 5 minutes par jour. On constate donc des variations quant à la prescription. Cependant, on insiste toujours sur la régularité : il vaut mieux 5 minutes par jour que 40 minutes, une fois par semaine.
Comme dans toute pratique de ce type, le fait de se livrer aux exercices quotidiennement permet, après quelque temps, d’arriver à déclencher la cohérence cardiaque beaucoup plus facilement. On peut alors se redonner un bon équilibre anti-stress dans un nombre impressionnant de circonstances, sans devoir s’exclure de ses activités. On pourra activer la cohérence cardiaque durant ses déplacements, dans toute situation d’attente, avant ou pendant des moments stressants, au lever et au coucher, etc.
De plus, si on peut utiliser la cohérence cardiaque pour s’aider à guérir des maux que le stress nous a infligés, on peut tout autant s’en servir dans une perspective proactive, comme on le fait avec l’activité physique ou une saine alimentation. On aura alors une meilleure concentration, on sera généralement plus détendu, plus serein, moins fatigué, on réagira avec moins d’émotions malsaines. Nul besoin d’être malade pour prendre soin de soi!
Sur Internet, on trouve des façons de pratiquer qui ne font appel qu’à la mise en place d’un rythme respiratoire à six respirations complètes par minute (inspiration et expiration de 5 secondes chacune − voir par exemple «Activez la cohérence cardiaque» sur You Tube).
On trouve aussi quatre courts vidéos où le psychiatre David Servan-Schreiber explique à une jeune femme la théorie et la pratique de la méthode (You tube, «servan-schreiber cohérence cardiaque»). En plus de nous donner des explications théoriques et de nous montrer une façon de pratiquer, ces vidéos ont l’avantage de nous faire voir comment la variation du rythme cardiaque est influencée par certaines émotions ou certaines tâches intellectuelles, par exemple, et de constater comment la méthode proposée redonne la cohérence cardiaque.

Au bureau, mes clients peuvent ainsi voir sur l’écran de mon ordinateur comment leurs pensées ou leurs émotions influencent leur cœur ainsi que leur fonctionnement sympathique/parasympathique et par le fait même tous leurs organes et fonctions organiques répondant au système nerveux autonome; ils peuvent aussi réaliser qu’ils ont du pouvoir pour redresser la situation en suivant les instructions simples de la méthode que nous ajustons pour chacun. Cela constitue pour eux un puissant incitatif à utiliser quotidiennement ce qu’ils ont appris à faire pour régulariser le fonctionnement de leur système nerveux autonome. (Il n’est pas nécessaire d’avoir le logiciel à la maison pour pratiquer).

Même appréciation de la part des gestionnaires que je vois en supervision ou en formation : on a le sentiment d’avoir du pouvoir sur son stress. On peut même lire, écouter des gens ou conduire sa voiture en utilisant une technique qui aide à maintenir la cohérence, ce qui multiplie d’autant le temps où on ne laisse pas le stress nous garder en état de dérèglement hormonal.

Tous les gens qui expérimentent la méthode vivent un certain succès, alors que la pratique de méthodes de relaxation ou de méditation sans biofeedback donne souvent un sentiment «de ne pas être capable»; il est en effet normal que la capacité à garder sa concentration sur toute technique soit faible au début. Dans les faits, on réussit à établir une certaine détente, mais on a le sentiment de ne pas y arriver. Et ce sentiment d’incompétence ne nous motive pas toujours à poursuivre... Toute forme de biofeedback présente donc un certain avantage.

On trouvera tout ce qu’il faut savoir sur la cohérence cardiaque en consultant le site internet  Heathmath.com.

Plus ça change...

S’il existe une constante dans toutes les méthodes qui nous ont montré à influencer mentalement nos états physiologiques, c’est bien... qu’il est possible d’y arriver. Le stress chronique et les émotions dites négatives déséquilibrent le corps vers une tension durable qui mène à la maladie (activité sympathique accrue, taux de cortisol élevé, le tout menant progressivement à un dérèglement organique de plus en plus important), alors que la détente (relaxation, méditation, approches corporelles) ainsi que les émotions plus positives ont l’influence contraire.

Du Yoga au training autogène, en passant par la relaxation progressive, la massothérapie, la sophrologie ou la méditation, le développement de méthodes qui favorisent l’homéostasie se sont succédées tout en apportant le même succès. La cohérence cardiaque vient s’ajouter à la liste. Exercera-t-elle suffisamment d’attrait sur vous pour que vous vous accordiez cinq minutes par jour pour respirer, pour sourire, pour revivre des évènements heureux? Je vous le souhaite et vous invite fortement à vous accorder ces quelques minutes de centration et de repos.

Cela dit, il reste bien sûr important de voir à s’assurer un bon équilibre de vie. L’obtention d’un plus grand bien-être par la pratique de méthodes psycho-corporelles efficaces ne devrait pas nous dispenser de nous donner une vie où un véritable bien-être est possible. La cohérence cardiaque ne devrait pas nous aider à pouvoir mieux endurer un genre de vie qui rend malade. Elle doit plutôt contribuer à une meilleure prise de conscience des effets néfastes d’une vie où le stress est trop grand, d’où on tirera la motivation à faire les choix nécessaires à une vie plus saine.

(1) Disponible en ligne (environ 350$) sur le site de Heartmath (heartmath.com)
(2) Servan-Schreiber, David : Guérir le stress, l’anxiété et la dépression sans médicaments ni psychanalyse, Robert Laffont, collection Réponses, Paris, 2003