La version de votre navigateur est obsolète. Nous vous recommandons vivement d'actualiser votre navigateur vers la dernière version.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 Burnout, dépression et épuisement

 

Des périodes de stress chronique engendrent malaises et maladies, notamment en santé mentale où les diagnostics de «trouble d’adaptation» et «épisode dépressif majeur» viennent justifier des arrêts de travail qui dureront souvent plusieurs mois. Mais un burnout est-il une dépression? 

 

L'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) définissait récemment le burnout comme "un syndrome résultant d'un stress chronique au travail qui n'a pas été géré avec succès" (1). Rappelons qu’un syndrome n’est pas en soi une maladie. Il s’en rapproche cependant du fait qu’il rassemble un ensemble de signes révélateurs d’un état pathologique, dont l’ensemble n’est cependant pas nécessairement associé à une maladie particulière. 

Le burnout se caractérise par « un sentiment de fatigue intense, de perte de contrôle et d'incapacité à aboutir à des résultats concrets au travail ». Les gens qui en souffrent ont un sentiment de grand manque d'énergie, un certain cynisme et un recul de leur désir d’investir dans leur travail ainsi qu’une perte d’efficacité professionnelle et un sentiment de ne pas être à la hauteur, qui peuvent mener à de la dévalorisation de soi.

Pour une autoévaluation avec instrument validé, on peut rechercher l’inventaire de Maslach (MBI) sur Internet. On peut aussi se donner une bonne idée avec le lien suivant : https://apprivoisersonstress.ca/outils/autoevaluation-epuisement-professionnel-burnout/.

 

Le mot burnoutne s’applique que si le syndrome est en relation avec le stress vécu au travail. En ce sens, peut utiliser épuisement professionnelcomme synonyme. Mais, à proprement parler, on ne peut pas utiliser les expressions burnout parentalou burnout amoureux, même si tout le monde comprendra un peu de ce dont on parle si on le fait.  

 

Retenons que le burnout n’est pas reconnu comme une maladie. Cela signifie qu’il ne constitue pas un diagnostic médical et ne peut en conséquence pas être invoqué pour justifier un arrêt de travail. Mais le stress chronique au travail, cause première du burnout, peut mener à la maladie; ce n’est qu’à ce moment-là qu’il sera légitime pour le médecin de signer un arrêt de travail.  Alors, quel sera le diagnostic?

Il s’agira souvent du trouble de l’adaptation. Dans le DSM-5, livre officiel des diagnostics en psychiatrie, ce trouble est classé dans le chapitre consacré aux troubles liés aux traumatismes et au stress et il est caractérisé par la présence de symptômes émotionnels ou comportementaux en réponse à un stress identifiable. Dans le burnout, les signes émotionnels et comportementaux sont présents et le stress est nécessairement identifié à la relation au travail; on se retrouve donc avec un diagnostic médical très acceptable.

Même s’ils ne sont pas mentionnés dans la définition du trouble, on pourrait ajouter la présence de symptômes physiques, puisqu’il ne saurait y avoir de stress chronique sans malaises ou maladies associés au fonctionnement biologique. Le stress chronique amène dans le corps de hauts taux d’adrénaline et de cortisol, lesquels engendrent des problèmes organiques dans les systèmes cardiovasculaire, digestif, musculo-squelettique, immunitaire, etc. 

Tous nos clients en burnout souffrent d’un ensemble de problèmes physiques, tels les maux de tête ou de dos, le reflux gastrique, la fatigue, l’insomnie, les douleurs musculo-squelettiques, les palpitations, les allergies, etc. On pourrait donc tout autant recevoir un diagnostic en santé physique si notre relation au travail crée un stress chronique nous menant vers le burnout. Les symptômes émotionnels et comportementaux seraient cependant aussi présents.

 

Caractéristiques du diagnostic

 

Les symptômes émotionnels reliés au trouble de l’adaptation peuvent être de type anxieux ou dépressif. Le trouble est dit aigu s’il dure moins de six mois et chronique s’il persiste au-delà. Il disparaît dans les six mois suivant la fin de l’exposition à l’agent qui a causé le stress et le facteur de risque principal en est le trouble de personnalité.

Ici les choses se corsent. On ne peut pas poser un diagnostic de trouble de la personnalité pour l’immense majorité des gens qui souffrent de burnout. Ils ont certes du mal à mettre des limites aux demandes de l’employeur (telles qu’ils les perçoivent), sont perfectionnistes, endossent des responsabilités qui ne leur appartiennent pas ou encore sont victimes d’intimidation, mais ce ne sont pas des gens impulsifs ou émotionnellement instables, caractéristiques appartenant au diagnostic psychiatrique de trouble de la personnalité limite. 

Ce sont le plus souvent des gens performants, impliqués, émotionnellement plutôt stables, collaboratifs. Bien sûr, une longue période de stress chronique vient bouleverser le fonctionnement émotionnel et rendre moins performant. Mais c’est le stress qui explique les symptômes et non des symptômes préexistants appartenant à l’individu qui mèneraient au stress et au trouble de l’adaptation.

Le problème avec le diagnostic trouble de l’adaptation est qu’il fait davantage porter les déséquilibres émotionnel et comportemental vécus à des caractéristiques personnelles qu’à des circonstances de vie éprouvantes. Or, le facteur causal se situe dans la rencontre entre des conditions stressantes et une personne vulnérable face à ces conditions.

Si, par exemple, on accepte de prendre le poste d’une personne en arrêt de travail pour épuisement, les risques sont grands qu’on ne se retrouve rapidement en période de stress chronique. Les conditions extérieures jouent ici un grand rôle, tout comme elles en jouent un dans les services où presque tout le monde dit vivre un stress quotidien intense. 

Par ailleurs, on sait aussi qu’il y a des gens qui ne feront jamais de burnout, comme me le disent des clients qui décrivent certains de leurs collègues comme étant beaucoup moins investis qu’eux dans le travail. Il y a ainsi des caractéristiques individuelles qui jouent dans l’intensité du stress qui va mener au burnout, mais elles ne sont pas à priori pathologiques. Elles ne sont simplement pas adaptées aux conditions. Par exemple, il n’est pas malsain d’être responsable mais, si on prend à deux la responsabilité de livrer une marchandise qui demanderait le travail de six personnes, cela devient malsain. 

 

Du trouble de l’adaptation à la dépression majeure

 

Les symptômes qui accompagnent le stress chronique évoluent en dents de scie sur une période plus ou moins longue. À un certain point de cette progression, ils pourraient justifier le diagnostic médical de trouble de l’adaptation. Mais, si la personne ne tient pas compte de ces signes et ne remédie pas à la situation, on aboutira à un épisode dépressif, à moins que certains aspects physiologiques ne se soient préalablement détériorés au point de justifier un diagnostic autre (infarctus, brûlures d’estomac, hypertension artérielle, pneumonie, etc.). 

Certaines études (2) montrent que l’effet du stress chronique sur le système immunitaire peut affaiblir la barrière hémato-encéphalique et finir par jouer un rôle dans l’importante baisse des neurotransmetteurs associés à une humeur saine et à un bon maintien de l’énergie (noradrénaline, sérotonine, dopamine, notamment). On aurait là une explication scientifique aux observations empiriques qui montrent que le stress chronique mène à des épisodes dépressifs. 

 

D’un point de vue médical, une dépression est diagnostiquée si, depuis deux semaines, la personne souffre de symptômes qui diffèrent de son état habituel dont, nécessairement, une humeur dépressive ou une perte d’intérêt ou de plaisir, et ce tous les jours. En plus on aura au moins quatre des symptômes suivants :  

  1. Perte ou gain de poids significatif (5%) en l'absence de régime, ou diminution ou augmentation de l'appétit tous les jours.
  2. Insomnie ou hypersomnie presque tous les jours.
  3. Agitation ou ralentissement psychomoteur presque tous les jours.
  4. Fatigue ou perte d'énergie tous les jours.
  5. Sentiment de dévalorisation ou de culpabilité excessive ou inappropriée (qui peut être délirante) presque tous les jours (pas seulement se faire grief ou se sentir coupable d'être malade).
  6. Diminution de l'aptitude à penser ou à se concentrer ou indécision presque tous les jours (signalée par le sujet ou observée par les autres).
  7. Pensées de mort récurrentes (pas seulement une peur de mourir), idées suicidaires récurrentes sans plan précis ou tentative de suicide ou plan précis pour se suicider.

 

Le test PHQ-9, facilement disponible sur Internet, est souvent utilisé. Il ne s’agit pas ici de faire un autodiagnostic, certaines nuances s’appliquent. Mais, si on constate qu’une majorité de symptômes sont présents et rendent difficile de vivre sa vie, il pourrait s’avérer utile d’aller chercher de l’aide.

 

Certaines distinctions

 

Le mot épuisementa été utilisé par le docteur Hans Selye pour nommer la troisième phase de ce qu’il a appelé le syndrome général d’adaptation, c’est-à-dire l’ensemble des signes organiques qui montrent qu’un organisme traverse une période de stress. Dans ce modèle, l’épuisement succède à la résistance, phase pendant laquelle l’organisme lutte pour arriver à se sortir du stress. Une première réaction, l’alarme, signale qu’il y a besoin d’adaptation. L’épuisement, c’est la phase où l’organisme n’arrive plus à s’adapter.

L’épuisement professionnel serait ainsi une transposition dans le monde du travail de ce syndrome général d’adaptation, le stress chronique menant à ne plus être en mesure de vaquer à ses occupations. Le mot burnout, à son origine, a décrit certains symptômes de cette troisième phase du syndrome général d’adaptation, dans une perspective psychologique ou psychosociale plutôt que biologique. Il s’est ensuite retrouvé dans le monde de la santé en tant que syndrome lié à une gestion déficiente du stress en milieu de travail. 

Le mot dépressiondécrit quant à lui une maladie, définie par un ensemble de symptômes qui peuvent ou non être l’aboutissement de toute période de stress chronique, stress dont l’origine n’est pas nécessairement liée au travail. 

 

Le cortisol

 

Le stress chronique s’accompagne d’une sécrétion accrue de cortisol. Cette hormone a notamment pour effet de permettre de pouvoir disposer longtemps d’un bon niveau d’énergie. Maintenue longtemps à un taux élevé, elle affecte cependant tout le système endocrinien et diminue, directement dans le cerveau, la capacité de faire face à ce qui nous stresse. À long terme, un dérèglement se produit et le taux chute dramatiquement, ce qui laisse l’individu avec une extrême fatigabilité. 

Madame Sonia Lupien, Ph. D., directrice du Centre d’études sur le stress humain (Institut universitaire en santé mentale de Montréal), nous dit que les gens en burnout produisent trop peu de cortisol, alors que les personnes qui souffrent de dépression en produisent trop (3), ce qui distingue les deux conditions d’un point de vue physiologique.

 

Problème de diagnostic

 

Un grand nombre des épuisements liés au travail étant diagnostiqués comme des dépressions, il s’ensuit que le traitement médical sera celui de la dépression. Ce traitement prévoit habituellement un arrêt de travail, une médication antidépressive et, éventuellement, un suivi en psychothérapie. 

Avec le temps et les traitements, la personne guérit de son état dépressif : elle retrouve du plaisir à vivre, de l’intérêt pour ce qu’elle aime, elle dort mieux, etc., si bien que le diagnostic d’épisode dépressif ne s’applique plus.

Mais l’épuisement, lui, n’est pas guéri. La capacité à disposer d’énergie en continu pour vaquer à ses occupations ainsi que celle de pouvoir se concentrer sur des sujets complexes comme ceux que l’on retrouve au travail sont encore loin d’être suffisantes. On se retrouve avec une incapacité à reprendre le travail tout en n’ayant pas de diagnostic pour le justifier. Ici, on doit compter sur l’habilité et le bon jugement de son médecin traitant,... quand on a la chance d’en avoir un!

 

Le traitement psychologique

 

En psychothérapie, on accompagnera la personne durant sa convalescence en l’invitant à prendre conscience du fait qu’elle est malade et qu’elle gagne à respecter sa fatigue. Cette maladie s’accompagne des signes d’une dépression, mais elle est différente : c’est une maladie sans nom officiel, qui correspond à un épuisement, lui-même conséquence de l’immense dépense d’énergie sans récupération adéquate que la personne a fourni durant les nombreux et longs mois qui ont précédé. Se voir comme épuisé plutôt qu’en dépression a souvent un impact positif. Et on prendra le soin de dire qu’on guérit très bien de cette condition, même si cela prend du temps.

On identifiera les causes externes du stress dans l’environnement de travail et dans la vie quotidienne hors travail, ainsi que les attitudes qui ont rendu ces sources de stress à ce point envahissantes (perfectionnisme, hyper-responsabilisation, anxiété de performance, peur de perdre l’emploi, confiance en soi déficiente, faible capacité à mettre des limites aux demandes, propension à se voir comme un sauveur, syndrome de l’imposteur, tendance au multitâche, etc.). Des conditions concrètes (monoparentalité, emploi rémunérateur malgré une faible scolarité) peuvent aussi avoir un impact important. De là, nous travaillerons à changer ce qui gagne à être changé si on veut éviter la récidive. 

On invitera aussi les gens à avoir un meilleur équilibre de vie et à intégrer les habitudes de vie qui ont pour effet de réduire le stress directement dans le corps : activité physique, sommeil suffisant, techniques de relaxation ou de méditation, périodes de repos, etc.

Certaines personnes changeront d’emploi ou d’employeur ou encore prendront une retraite quelque peu prématurée; d’autres retourneront à leur poste en apprenant à laisser moins de place au travail dans leur équilibre de vie.

 

Prévenir...

 

L’incapacité à décrocher du travail après la journée et l’apparition de symptômes (fatigue, irritabilité, insomnie, points dans le dos, boule dans la gorge (4)) sont des signaux clairs à l’effet que notre organisme est en période de stress chronique et que de deux choses l’une : ou bien on est certain que la situation problématique à laquelle on fait face va s’améliorer à très court terme, ou bien on doit lâcher prise et s’occuper de sa santé. Car, peu importe le nom de la maladie vers laquelle on se dirige, elle va faire mal et durer longtemps.

 

(1) https://www.who.int/mental_health/evidence/burn-out/fr/

 

(2) voir par exemple :  https://cervo.ulaval.ca/fr/une-etude-de-caroline-menard-contribue-expliquer-comment-le-stress-chronique-peut-mener-la

 

(3) https://www.stresshumain.ca/stress-et-vous/travailleurs/burnout-vs-depression/

 

(4) Voir par exemple

https://www.apprivoisersonstress.ca/stress-au-travail/articles-parus-dans-travail-et-sante/test-du-mille-pattes/